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Merci au Dr Durie et à l'IMF de nous avoir permis de traduire et publier cet article. Notez que les redirections intégrées dans cet article sont issues de la version originale anglaise.
Une table ronde sur le myélome afin de comprendre la crise de la COVID-19
Dr Brian G.M. Durie
de l'International Myeloma Foundation (IMF)

Date de publication : 13 août 2020
La semaine dernière, l’IMF a organisé une table ronde avec des spécialistes du myélome provenant de partout à travers le monde dans le but de définir les recommandations du International Myeloma Working Group (IMWG) en lien avec la pandémie de la COVID-19. Des chercheurs du myélome de l’Asie-Pacifique, de l’Europe, et des États-Unis étaient présents. (Les commentaires de l’Amérique latine suivront prochainement.) 

Bien que tous les participants du sommet 2020 du IMWG, qui a eu lieu du 25 au 27 août, contribueront aux recommandations du IMWG pour le traitement des patients atteints d’un myélome multiple au cours de la pandémie actuelle (et de toute autre pandémie éventuelle), ce premier groupe de travail a examiné les renseignements disponibles et discuté de recommandations provisoires. 

Notre discussion portait sur quatre points clés : 
1.Les différences marquées dans le profil des infections à la COVID-19 chez les patients atteints d’un myélome multiple à travers le monde. 
L’origine de la pandémie de la COVID-19 et la chronologie de sa propagation dans toute la région de l’Asie-Pacifique, puis en Europe, aux États-Unis et dans les autres régions du monde ont été établies. Chaque groupe a ensuite résumé ses expériences auprès des patients atteints d’un myélome multiple durant la pandémie de la COVID- 19. 
Des résultats sur le sujet ont déjà été publiés par des équipes de recherche au Royaume-Uni, en Espagne, et aux États-Unis (Mount Sinai, Memorial Sloan Kettering). Les résultats sont résumés dans un tableau.
En Asie, il y a une absence frappante de cas d’infections à la COVID-19 chez les patients atteints d’un myélome multiple. Cela est à la fois exceptionnel et tout à fait remarquable. Après plusieurs questions de suivi de la part des participants à la table ronde, il ne fait aucun doute qu’à travers l’Asie, il n’y a eu aucune infection à la COVID-19 chez les patients atteints d’un myélome multiple ni de décès liés à la COVID-19. Les exceptions mineures sont la Chine et l’Australie, où de rares cas ont été notés et un ou deux décès sont sans doute survenus.

Qu’est-ce qui explique l’absence de cas d’infections à la COVID-19 chez les patients atteints d’un myélome multiple en Asie? La discussion à la table ronde a révélé plusieurs facteurs :

  • Les mesures de prudence conventionnelles en Asie concernant les maladies infectieuses et l’usage fréquent de masques en public.

  • La mise en œuvre très rapide d’excellentes mesures de santé publique fondées sur les expériences antérieures à l’égard du SRAS et d’autres infections. À Taiwan, par exemple, d’excellentes mesures de santé publique ont été immédiatement introduites.

  • La participation fréquente de centres spécialisés dans les soins aux patients atteints d’un myélome multiple. L’IMF opère le Asian Myeloma Network (AMN), un réseau d’essais cliniques en Asie. Au sein de ce réseau, des chercheurs expérimentés mettent en pratique les recommandations Asie-Pacifique concernant le myélome publiées par le réseau. Cela a sans aucun doute été utile.
  • L’exposition précoce en Asie à la « souche Wuhan » initiale de la COVID-19. Les preuves démontrent maintenant qu’une nouvelle souche plus infectieuse et associée à différents profils de maladies est apparue en Europe, principalement dans la région de Lombardie en Italie. Cette souche plus infectieuse est ultérieurement devenue la souche dominante à New York, dans le reste des États-Unis (se propageant d’est en ouest, puis au sud), et ailleurs dans le monde où les voyages n’étaient pas interdits. Lorsque cette souche est apparue, les voyages en Asie ont été interdits. Ainsi, les patients asiatiques ont largement évité d’être exposés à une souche plus dangereuse de la COVID-19. Inversement, aux États-Unis et en Europe, plus d’infections à la COVID-19 ont été répertoriées, et, malheureusement, un nombre important de décès a été recensé.  
  • Le niveau de propagation communautaire est demeuré faible, grâce à la mise en œuvre rapide de mesures de santé publique en Asie. Il n’y a eu aucune augmentation importante au-delà de l’augmentation massive initiale à Wuhan, là où quelques patients atteints d’un myélome multiple ont possiblement été infectés, et où les ressources hospitalières n’ont pas été submergées, comme ce fut le cas en Italie, en Espagne, au Royaume-Uni, à travers les États-Unis et ailleurs dans le monde.

Le nombre préoccupant d’infections à la COVID-19 en Europe et aux États-Unis (notamment au Royaume-Uni et à New York) confirme le danger pour les patients atteints d’un myélome multiple, particulièrement lorsque la maladie est active ou chez les patients qui présentent des caractéristiques associées à un risque élevé. Le taux de mortalité qui varie entre 20 et 30 % pour les patients qui présentent des complications pulmonaires graves est signe qu’il faut éviter, dans la mesure du possible, une exposition et une infection à la COVID-19. 

Prévenir l’exposition et l’infection à la COVID-19 chez les patients atteints d’un myélome multiple demeure notre plus grande priorité!
2.Les mesures de sécurité à prendre pour les patients atteints d’un myélome. 
Les participants de la table ronde ont fortement insisté sur la nécessité de respecter les mesures de sécurité, y compris le port du masque, la distanciation physique, l’évitement des foules et des espaces intérieurs restreints, et avoir de bonnes pratiques d’hygiène. Comme je l’ai souligné à maintes reprises dans des blogues précédents, les espaces extérieurs sont beaucoup plus sécuritaires que les espaces intérieurs.

Les participants de la table ronde ont fait connaître leurs préoccupations face au manque de capacités de dépistage rapide (pour la COVID-19 en soi plutôt que pour les anticorps) aux États-Unis. Cette situation limite sérieusement la capacité de dépister, de rechercher les contacts et d’isoler efficacement les personnes infectées. Cette lacune est associée à la propagation communautaire et à de nombreux décès. On a récemment annoncé que deux compagnies redoubleront les efforts pour tenter d’offrir un dépistage rapide, mais non à une échelle ni dans un délai qui permettront d’atténuer les augmentations actuelles. Cela signifie également que les confinements stratégiques ou soi-disant intelligents qui sont articulés autour de nouvelles grappes de cas sont impossibles. Ainsi, la très impopulaire perspective de confinements plus généraux sera presque inévitable.
Ce serait génial si nous pouvions suivre l’exemple de la Nouvelle-Zélande. Suite à un confinement initial, les infections ont été ramenées à zéro pendant 102 jours. Quatre nouveaux cas ont été identifiés cette semaine au sud d’Auckland (source originale inconnue à ce jour).  
Il serait possible d’anéantir immédiatement cette nouvelle petite grappe de cas en ayant recours à un confinement local stratégique, un dépistage rapide, une recherche de contacts et un isolement préventif. C’est de cette façon que l’on devrait agir.
3.Le traitement du myélome durant la pandémie.
La principale recommandation des participants à la table ronde est que tous les efforts doivent être mis en œuvre pour continuer à offrir les meilleures options de traitements pour le myélome et prolonger la rémission autant que possible. Cela doit être l’objectif. S’il y a une augmentation des infections à la COVID-19 dans une communauté, alors diverses options d’urgence peuvent être retenues, notamment :
  • Les rendez-vous par télémédecine, pour réduire les visites en clinique et à l’hôpital. Il s’agit d’une option utile pour bon nombre de patients.

  • La réduction temporaire des infusions intraveineuses de bisphosphonates.

  • Le report des traitements par GACS ou par cellules CAR T si le manque de ressources hospitalières sont une préoccupation.

  • Le recours aux options de traitement par voie orale, sauf dans le cas où l’efficacité du traitement pourrait être compromise.

  • La réduction des doses ou la modification des schémas posologiques pour éviter les infections, s’il y a lieu. L’objectif est toutefois de reprendre les traitements recommandés dès que possible.
4.Les nouvelles options de traitement ou de gestion de la COVID-19.
Parmi les options discutées par les participants de la table ronde, notons :


  • Les commentaires mitigés au sujet de l’efficacité du plasma en phase de convalescence. 

  • Les vaccins pour la population immunodéficiente ou âgée.  

  • L’absence d’avantages notables ou inattendus avec les traitements vantés tels que la dexaméthasone, l’interféron ou autres cocktails antiviraux.  
Beaucoup de travail reste encore à faire en ce qui a trait aux traitements antiviraux et aux vaccins afin de mener à bien tous les efforts remarquables qui ont été faits. L’introduction précoce d’un vaccin en Russie a soulevé beaucoup de questions. Comment pouvons-nous savoir si les vaccins qui seront mis en marché sont vraiment sécuritaires et suffisamment efficaces, notamment pour les groupes vulnérables, âgés et immunodéficients?

Nous en savons plus aujourd’hui qu’au début de pandémie à propos des mesures qui protègent les patients atteints d’un myélome multiple d’une infection à la COVID-19. Et au cours des trois derniers mois, des douzaines de nouvelles études ont été publiées et doivent être maintenant évaluées. Notre prochaine étape consiste à réunir un plus grand bassin de chercheurs des quatre coins du monde afin de comparer les expériences et créer des recommandations pour agir face à une crise sanitaire mondiale. Le IMWG publiera un rapport final après son sommet. Un dossier à suivre!
Le Dr Brian G.M. Durie a fondé l’International Myeloma Foundation (IMF), dont il est aujourd’hui le président, et siège à son conseil consultatif scientifique. Il est également le président du groupe de travail international sur le myélome de l’IMF, un consortium regroupant près de 200 spécialistes du myélome d’un peu partout dans le monde. Le Dr Durie dirige également le projet Black Swan Research Initiative® de l’IMF.
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