Le 23 Avril 2020
Le Secrétariat de la Convention de Bâle prévoit d'organiser le GTCNL 12 électroniquement: pas une bonne idée
Cette semaine, nous venons tous d'apprendre la proposition du Secrétariat et du Bureau d'organiser la prochaine réunion du GTCNL de la Convention de Bâle par voie électronique en raison de la crise sanitaire mondiale du COVID-19.
 
Bien que nous comprenons certainement les préoccupations liées à la pandémie mondiale actuelle, auxquelles nous sommes tous confrontés, et bien que nous comprenons qu'il est nécessaire de penser et d'agir en dehors des normes à cause de cette pandémie, nous ne pouvons pas considérer la réponse du Secrétariat comme acceptable et appropriée.

La Convention de Bâle a toujours cherché à être inclusive, équitable et aussi circonpsect que possible. Une pandémie n'est pas une excuse pour changer de cap.

Premièrement, la proposition du Secrétariat de la Convention de Bâle, telle qu'elle a été communiquée dans son message du 20 avril, enfreint le règlement intérieur de la Convention et la décision de mandat du GTCNL VI / 36. Les propositions de modification de ces règles et de la décision doivent être acceptées par toutes les parties.
 
Deuxièmement, la tenue de l'GTCNL 12 par voie électronique nuira grandement aux circonstances déjà difficiles auxquelles les pays en développement et les pays en transition sont confrontées par rapport à leur participation à la Convention de Bâle ainsi qu'aux processus démocratiques de la Convention. Nous pensons que l'urgence déclarée de tenir la réunion coute que coute en Juin par voie électronique n'est pas une raison convaincante de suspendre les procédures normales établies par la Convention.
 
Les pays en développement et les pays en transition sont déjà désavantagés de manière disproportionnée en ayant moins de ressources à consacrer aux questions de la Convention de Bâle, notant qu'ils:
 
  • disposent de moins de personnel pour suivre les nombreux groupes de travail et différentes problématiques;
  • disposent de moins de personnel maîtrisant la langue dominante, l'anglais, voire l'une des 6 langues des Nations Unies; et
  • disposent de moins de fonds pour envoyer de grandes délégations aux réunions.
 
Pour les pays en développement et les pays en transition, cette nouvelle proposition du Secrétariat ne fait qu'empirer les choses.
 
Rappelons-nous que ce qui est proposé est contraires aux règles établies de la Convention et crée des effets négatifs disproportionnés pour les pays en développement:
 
  • Suspension de la règle de conduire un GTCNL dans les 6 langues des Nations Unies. La réunion en ligne proposée sera conduite uniquement en anglais. Cela est contraire au paragraphe 10 du mandat de la COP instituant le Groupe de travail à composition non limitée (décision VI / 36) et crée un énorme désavantage, notamment pour l'Amérique latine, l'Afrique francophone et l'Asie.
 
  • Le mécanisme de décision par consentement tacite de 48 heures proposé ne permet pas aux délégués des Parties travaillant à domicile de consulter leurs experts au niveau national, et encore moins au niveau régional, ni d'entendre des experts internationaux et des agences intergouvernementales sur des questions de grande importance. La période de 48 heures, y compris le week-end, néglige le fait que les délégués sont soumis à des couvre-feux ou des ordonnances les commandant de rester chez soi et devront donc trouver des moyens durant la semaine pour accéder à la nourriture, produits de santé, etc. Cette nouvelle méthode de prise de décision enfreint le Règlement intérieur de la Convention de Bâle et désavantage les pays ayant moins de personnel et qui dépendent d'experts régionaux, d'agences intergouvernementales, d'ONG et autres.
 
  • La proposition de commencer les réunions à 14h00 (horaire de Genève) et donc de baser l'horaire sur un de fuseau horaire euro-centrique désavantagerait les délégués dans une grande partie du monde (en particulier cela désavantagerait l'Asie de l'Est et l'Amérique latine occidentale). De toute façon une réunion électronique désavantagera toujours une région au monde.
 
  • Les procédures proposées concentrent beaucoup trop de pouvoir de décision et de discrétion entre les mains des co-présidents, des délégations avec de nombreux experts et du Secrétariat. Il s'agit d'un retour en arrière dangereux des procédures démocratiques du droit international. En outre, ces procédures proposées par le Secrétariat enfreignent le règlement intérieur.
 
  • Afin de pouvoir participer pleinement au GTCNL 12, un accès fiable à Internet et aux appareils électroniques est nécessaire. La décision de conduire la réunion de manière électronique suppose une situation d'équité numérique qui, comme nous le savons, n'existe pas dans toutes les régions du monde. La demande d'ordinateurs pour le travail à domicile est élevée et souvent non satisfaite même dans les pays développés. En outre, la fiabilité d'une connexion Internet haut débit et du réseau électrique pour l'alimenter n'est pas assuré à cause d'une perturbation économique actuelle. En vue de téléconférence des délégués à partir des réseaux domestiques, nous pouvons être certains que certains délégués ne pourront pas accéder correctement à la réunion et le Secrétariat ne sera pas en mesure d'interrompre les travaux pour attendre qu'une connexion internet d'un délégué soit rétablie.
 
  • À l'heure actuelle, nous ne pouvons pas prédire l'impact de la pandémie et son évolution future. Cependant, de nombreux experts s'attendent à ce l'impact de la pandémie ne s'est pas encore pleinement manifesté dans les pays du Sud et prévoient d'énormes défis pour la gérer en Afrique et en Amérique latine dans un avenir proche. Pouvons-nous être sûrs que nous pourrons organiser une réunion équitable au moment de la pandémie, où certaines Parties seront plus désavantagées que d'autres?
 
En raison de tout ce qui précède, la légitimité de tout résultat de la réunion est sérieusement mise en doute.
 
En conclusion, il est clair que lors d'une pandémie, nous sommes parfois contraints à faire les choses de manière différente sauver des vies. Cependant, le GTCNL n'est pas une question de vie ou de mort. Le monde évalue et réagit à cette pandémie en remportant de nombreux événements, à juste titre. Il est parfaitement légitime de retarder le GTCNL 12 jusqu'à ce qu'il puisse être tenu de manière correcte et équitable pour toutes les Parties.
 
Nous comprenons la préoccupation du Secrétariat quant à la recherche de locaux pour la prochaine réunion. Cependant un argument peut être fortement avancé, non pas pour organiser une réunion injuste et médiocre qui manquera de légitimité, mais plutôt pour mettre de côté le budget du GTCNL de juin et de l'investir pour la COP 15 de la Convention de Bâle afin de prévoir une réunion plus longue et plus inclusive grâce à ce budget.
 
La pandémie ne peut pas être précipitée et de la même manière nous ne devons pas précipiter des décisions importantes qui auront un impact sur la façon dont les substances dangereuses sont exportées et vraisemblablement déversées à travers le monde. Nous exhortons les Parties à s'exprimer maintenant pour éviter une réunion insatisfaisante et probablement illégitime.

FIN
À propos du Basel Action Network

Fondé en 1997, le Basel Action Network est une organisation caritative 501 (c) 3 des États-Unis, basée à Seattle, WA. BAN est la seule organisation au monde axée sur la lutte contre l'injustice environnementale mondiale et les moteurs économique du commerce toxique et ses effets dévastateurs. Aujourd'hui, BAN sert de centre d'information sur le sujet du commerce des déchets pour les journalistes, les universités et le grand public. Grâce à ses enquêtes, BAN a découvert la tragédie du déversement de déchets électroniques dangereux dans les pays en développement. Pour plus d'informations, voir www.BAN.org.