Vendredi, 29 novembre, 2019 

LE RISQUE DE DÉRIVE DE LA MISSION LÉGISLATIVE : POURQUOI LES OBJECTIFS DE LA LOI CANADIENNE DE L'AIDE MÉDICALE À MOURIR DOIVENT ÊTRE AFFIRMÉS

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L'arrêt Truchon du Québec a fait plus qu'annuler le critère de « prévisibilité raisonnable de la mort naturelle » de la loi canadienne sur l'aide médicale à mourir. Il a aussi éviscéré deux objectifs cruciaux de la loi.

La juge Baudoin souligne dans le paragraphe 555 que :

« [...] le Tribunal ne peut retenir les deux premiers objectifs mis de l'avant par le procureur général relatifs à l'affirmation de la valeur inhérente et à l'égalité de chaque vie humaine et à l'importance de prévenir le suicide. Comme dans Carter, le Tribunal considère que ces objectifs sont énoncés de manière trop large et constituent plutôt des vecteurs d'affirmation de valeurs [...] »

Lorsque nous envisageons ces objectifs en tenant compte de la Norme sur la protection des personnes vulnérables, ils ne peuvent pas être aussi facilement rejetés. Veiller à ce que toutes les vies aient une dignité inhérente, quel que soit le mode de vie, et qu'elles soient dignes de respect n'est pas seulement symbolique. Il en va de même pour la prévention du suicide. Ces objectifs sont bien réels et conséquents, et ils méritent une grande attention.

Les juristes Trudo Lemmens et Laverne Jacobs ont écrit le 9 octobre dans The Conversation que :

« À cause [du rejet des objectifs explicitement énoncés de la loi, la juge Baudouin] n'a pas réussi à évaluer si l'impact sociétal plus large d'un régime élargi d'AMM pouvait justifier la restriction actuelle de fin de vie. Le Parlement a explicitement introduit cette restriction afin d'équilibrer l'autonomie des personnes qui demandent l'aide médicale à mourir avec la nécessité de protéger les intérêts des personnes vulnérables, ainsi que les intérêts plus larges de la société consistant à éviter les perceptions négatives et prévenir le suicide. »

La décision du tribunal de première instance dans l'affaire Truchon nous amène à nous demander si quelque chose d'autre qu'un libre accès à l'aide médicale à mourir sans restrictions sera considéré comme conforme à la Constitution. Si le Parlement liait directement, par exemple, un critère de fin de vie à l'objectif législatif visant à promouvoir le droit égal de vivre dans le respect et la dignité, celui-ci pourrait-il être maintenu? Si le Canada voulait prévenir par un critère de fin de vie le suicide des Canadiens et Canadiennes les plus marginalisés ou apparemment sacrifiables, pourrait-il le faire? Un appel de la décision ou un renvoi à la Cour suprême pourrait résoudre cette incertitude.

À cet égard, une lettre ouverte au procureur général signée par plus de 70 organismes communautaires nous mettait en garde :

« En rejetant [ces objectifs], la cour restreint le pouvoir du Parlement de gouverner pour un Canada inclusif et équitable. C'est un dangereux précédent. [...] Est-il raisonnable pour le gouvernement de limiter [...] [l']autonomie afin de préserver [les intérêts] de [...] [l']égalité et [l']inclusion? Sans appel, nous ne le saurons jamais. »

MATIÈRE À RÉFLEXION

Voici une question à approfondir d'Audrey Cole, conseillère de la NPPV :

L'« aide médicale à mourir » implique instinctivement que le processus lié à la mort est devenu réel et évident. Sans critère de fin de vie, la loi exige certainement un titre plus véridique, comme celui de « suicide assisté par un médecin », ce qui soulèverait à juste titre un ensemble bien différent de préoccupations et de questions.

En quoi l'« aide médicale à mourir » diffère-t-elle du « suicide assisté par un 
médecin »?
ACTUALITÉS

« Pour plusieurs malades et leur famille, mourir dans la dignité est un droit fondamental et doit être élargie notamment aux personnes souffrant de maladies dégénératives incurables, comme l'Alzheimer par exemple. Pour d'autres, élargir l'accès est irresponsable et scandaleux. Le risque d'être euthanasié pour des raisons insuffisantes, comme une dépression passagère, ou pire, contre son gré, est trop grand. Alors, doit-on élargir l'accès à l'aide médicale à mourir? »

Cette question est débattue par un panel d'experts à Zone Franche.

DANS LA LITTÉRATURE
 
Schultz  et al . 2019.  Determination of Competency for High-Gravity Life-Death Decision-Making. Psychological Injury and Law . Mis en ligne le 15 novembre.
The Vulnerable Persons Standard was developed by a group of more than forty advisors with expertise in medicine, ethics, law, public policy and needs of vulnerable persons. The Standard is a series of evidence-based safeguards intended to help ensure that Canadians requesting assistance from physicians to end their life can do so without jeopardizing the lives of vulnerable persons who may be subject to coercion and abuse. 

To learn more about the Standard and the many Canadians and organizations endorsing the Standard, please visit us at www.vps-npv.ca.
Vulnerable Persons Secretariat
www.vps-npv.ca

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