Plus de 300 médecins canadiens issus d'un vaste éventail de spécialités et de régions géographiques ont signé une
lettre ouverte
pressant l'honorable David Lametti, procureur général du Canada, d'honorer les engagements du pays à l'égard des valeurs d'inclusion et de compassion. Exprimant un soutien unanime envers une exigence de fin de vie pour avoir droit à l'AMM, ils ont souligné l'important contexte législatif de la loi canadienne :
« Quand la loi originale sur l'AMM a fait l'objet de débats au Parlement, il était clair que l'AMM devait avoir des limites, que les droits individuels devaient être équilibrés avec des protections non seulement pour nos citoyens les plus vulnérables, mais également pour notre société. »
Les médecins ont une compréhension unique des conditions sociales dans lesquelles la vulnérabilité est ancrée et des risques inhérents pour les personnes vulnérables quand l'accès à l'AMM est étendu et illimité. En s'inspirant de leur propre expérience à prendre soin des Canadiennes et Canadiens vulnérables, ils expliquent :
« Jour après jour, nous participons à un système de santé et un système de soutien social qui ne répond pas aux besoins de base de nos patients les plus vulnérables. De nombreux médecins éprouvent un important sentiment de détresse à cause de ces interactions décourageantes avec ces personnes que nous nous engageons à aider, mais à qui nous n'avons que des ressources limitées à offrir. Nous savons que de nombreux patients au Canada choisissent l'AMM en raison des souffrances attribuables à un manque de soutien adéquat. »
À titre d'exemple de ce genre de souffrance, la lettre des médecins mentionne l'histoire de
Sean Tagert
, un homme de la Colombie-Britannique atteint de sclérose latérale amyotrophique qui a reçu l'AMM en août dernier. Depuis plusieurs années, M. Tagert luttait sans succès pour obtenir le financement adéquat pour obtenir des soins à domicile qui lui auraient permis de conserver un lien étroit avec son fils de 11 ans. La
page Facebook
de M. Tagert relate l'érosion insidieuse de son autonomie devant les politiques capacististes et les refus de soutien à répétition. La page se termine par un hommage posthume qui présente la désagréable « option » du placement en établissement qui l'attendait - un arrangement qui lui aurait offert « des soins bien inférieurs tout en l'éloignant de sa famille, et qui aurait sans doute hâté sa mort ».
Des récits tels que celui de M. Tagert exposent clairement comment une décision véritablement autonome peut être minée, de manière subtile, par les ressources et la condition sociale d'une personne. Comme le Dr Ewan Goligher, l'un des signataires de la lettre ouverte, l'a
écrit
le mois dernier dans le Lethbridge Herald :
« Une décision exprime l'autonomie d'une personne dans la mesure où la décision lui appartient : elle reflète ses souhaits et ses valeurs et ne lui est pas imposée de quelque manière que ce soit. Cette notion d'autonomie présume que nous pouvons tous nous élever au-dessus des forces imposées par autrui. Or, nous décelons là la possibilité d'une grave erreur. Il est facile de déceler les efforts manifestes de coercition, et d'y résister, mais il est beaucoup plus difficile d'estimer les influences subtiles de l'appréciation sociétale qui sont bien plus irrésistibles. »
Pour le Parlement nouvellement élu du Canada - et particulièrement pour le cabinet - qui a maintenant la responsabilité de percevoir ces influences subtiles de l'appréciation sociétale dans la perspective de modifier le cadre législatif de l'AMM, les enjeux sont très élevés.
Ce serait une grave erreur d'offrir l'AMM à l'ensemble des citoyens qui souhaitent mourir sans tenir compte de la source de leur souffrance.